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LA FIN DU VOYAGE

— Ah ! Olivier, Olivier, qu’est-ce que nous avons fait ? Nous sommes fous, nous sommes fous ! Ne nous faisons plus souffrir !

S’il était rentré, dans ce moment !

Et ce fut dans ce moment, justement, qu’elle trouva ces lettres… Tout fut fini. — Pensa-t-elle qu’Olivier l’avait réellement trompée ? Peut-être. Mais qu’importe ? La trahison pour elle n’était pas tant dans l’acte, que dans la volonté. Elle eût pardonné plus aisément à celui qu’elle aimait d’avoir une maîtresse que d’avoir en secret donné son cœur à une autre. Et elle avait raison.

— La belle affaire ! diront certains… — (Les pauvres êtres, qui ne souffrent d’une trahison d’amour, que si elle est consommée !… Quand le cœur reste fidèle, les vilenies du corps sont peu de chose. Quand le cœur a trahi, le reste n’est plus rien.)…

Jacqueline ne pensa pas une minute à reconquérir Olivier. Trop tard ! Elle ne l’aimait plus assez. Ou peut-être qu’elle l’aimait trop. Non, ce n’était pas de la jalousie qu’elle avait. C’était toute sa confiance qui s’écroulait, tout ce qui lui restait secrètement de foi et d’espoir en lui. Elle ne se disait pas qu’elle-même en avait fait fi, qu’elle l’avait découragé, poussé à cet amour, que cet amour d’ailleurs