était innocent, et que l’on n’est pas le maître, enfin, d’aimer ou de n’aimer pas. Il ne lui venait pas à l’idée de comparer à cet entraînement sentimental son flirt avec Christophe : Christophe, elle ne l’aimait point, il ne comptait point ! Dans son exagération passionnée, elle pensa qu’Olivier lui mentait, et qu’elle n’était plus rien pour lui. Le dernier appui lui manquait, au moment où elle tendait la main pour le saisir… Tout était fini.
Olivier ne sut jamais ce qu’elle avait souffert, dans cette journée. Mais quand il la revit, il eut l’impression, lui aussi, que tout était fini.
À partir de ce moment, ils ne se parlèrent plus, sinon quand ils étaient devant les autres. Ils s’observaient, comme deux bêtes traquées, qui sont sur leurs gardes, et qui ont peur. Jeremias Gotthelf décrit, quelque part, avec une bonhomie impitoyable, la situation sinistre d’un mari et d’une femme qui ne s’aiment plus et se surveillent mutuellement, chacun épiant la santé de l’autre, guettant les apparences de maladie, ne songeant nullement à hâter la mort de l’autre, ni même à la souhaiter, mais se laissant aller à l’espérance d’un accident imprévu, et se flattant de part et d’autre d’être le plus robuste des deux. Il y