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140 L’AME ENCHANTEE

nuque, et sa forte chevelure aux masses enroulées, — elle pensait :

— Elle rêve, encore, ma grande ; elle est de nouveau plongée dans son coffre à folies. Ce qu’il en doit tenir, le coffre !… Heureusement que je suis là, maintenant ! On ne l’ouvrira pas sans moi…

Car la petite cadette avait la conviction, peut-être exagérée, de sa supériorité de sens et d’expérience. Et elle se disait :

— Je la protégerai.

Elle aurait eu besoin de se protéger d’abord. Car, dans son coffre, les folies ne manquaient pas non plus. Mais celles-là, elle les connaissait d’avance ; et elle les regardait, comme un propriétaire regarde ses locataires. Si on leur donne logement, ce ne sera pas pour rien… Et puis, « fais ce que veux, advienne que pourra ! » Tant qu’il ne s’agissait que de soi, cela n’avait pas une énorme importance. On se débrouillerait toujours… Mais protéger une autre, c’était là un sentiment nouveau et délectable…

Oui, mais… Annette, le front penché, qui ne travaillait pas, caressait justement le même sentiment. Elle pensait :

— Ma petite folle chérie !… Heureusement que je suis arrivée à temps pour la guider !…

Et elle formait, pour l’avenir de Sylvie, des