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280 L’AME ENCHANTÉE

nirs qui faisaient bondir le cœur, des accès de désespoir, orgueil, passion ulcérés, et le sentiment des ruines, de l’irrémédiable, d’un Destin contre qui tous les efforts sont vains, — sentiment accablant d’abord, puis morne, puis se fondant peu à peu en un engourdissement, dont la tristesse lointaine était empreinte d’une étrange volupté… Elle ne comprenait pas…


Elle se revit, une nuit, en songe, dans la forêt gonflée de bourgeons. Elle était seule. Elle courait à travers les fourrés. Les branches d’arbres s’accrochaient à sa robe ; les buissons humides s’agrippaient ; elle s’y arracha, mais en se déchirant ; elle se vit, avec honte, à demi nue. Elle se courba pour se couvrir des lambeaux de sa jupe. Et voici qu’elle aperçoit par terre, devant elle, une corbeille ovale, sous un amoncellement de feuilles ensoleillées, — non pas jaunes et dorées, — mais blanc d’argent, pareilles à un tronc de bouleau, blanc de linge très fin. Elle regarde, émue, elle s’agenouille auprès. Et elle voit le linge qui commence à bouger. Le cœur battant, elle tend la main, — s’éveille… — Son émoi persistait… Elle ne comprenait pas…


Un jour vint — elle comprit… Elle n’était