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L’AME EXCHANTÉE

peine, tâchant de ne pas montrer l’émoi où la jetaient ces récits amoureux. Sylvie, qui sentait sous ses doigts les émotions de l’autre, s’arrêta pour en jouir et préparer une malice nouvelle : et, se penchant vers Annette, à mi-voix, candidement, lui demanda si elle avait aussi un ami. Annette tressaillit — (elle ne s’y attendait pas) — et rougit. Les yeux perçants de Sylvie cherchaient à voir ses traits dans l’ombre protectrice : et, n’y parvenant pas, elle promena ses doigts sur la joue d’Annette…

— Elle brûle, dit-elle, en riant.

Annette riait gauchement, et brûlait encore plus. Sylvie se jeta à son cou.

— Ma sotte, ma bécasse, comme tu es donc mignonne ! Non, tu es impayable ! Ne m’en veux pas ! Je me tords. Je t’aime bien. Aime un peu ta Sylvie ! C’est pas grand’chose de bon. Mais tel quel, c’est à toi. Annette, ma canette ! Tends ton bec, je t’amoure !…

Annette, passionnément, la serra dans ses bras, jusqu’à en perdre haleine. Sylvie, se dégageant, dit d’un ton connaisseur :

— Tu sais bien embrasser. Qu’est-ce qui t’a appris ? Annette lui ferma la bouche, rudement, avec sa main :

— Ne plaisante pas toujours !

Sylvie lui baisa la paume :