une propreté morale, comme une beauté. Et s’ils étaient impurs, ils estimaient que c’était là une affaire entre eux et leur conscience, non la conscience des autres. Annette ne se reconnaissait de comptes à rendre envers personne. Si elle se confessait à Julien, c’était un don d’amour qu’elle lui faisait. Elle ne lui devait, honnêtement, que l’exposé de sa vie. Mais sa vie intérieure, elle ne la lui devait point. Elle la lui livrait volontairement. Elle voyait maintenant que Julien eût préféré qu’elle embellit la vérité. Mais elle était trop fière pour profiter d’une excuse mensongère, dont elle ne sentait nullement le besoin. Elle s’appliqua, au contraire, quand elle comprit ce qu’il voulait lui faire dire, à ce qu’il sût que c’était elle qui s’était donnée à l’amant.
Julien, atterré, ne voulait pas entendre.
— Non, non, je ne vous crois pas, disait-il. Vous êtes trop généreuse ! Pour défendre cet homme, qui ne mérite que le mépris, ne vous accusez pas !
— Mais je n’accuse personne, dit-elle, avec simplicité. Le mot le frappa dans sa conscience ; mais il se refusa à comprendre.
— Vous tâchez de le disculper.
— Je n’ai pas à disculper. Il n’y a pas de coupable. Julien se débattait.
— Annette, je vous en conjure, ne parlez pas ainsi !
— Pourquoi ?
— Vous savez bien que c’est mal !
— Mais non, je ne le sais pas.
— Quoi ? Vous ne regrettez rien ?
— Je regrette de vous attrister. Mais, mon ami, je ne vous connaissais pas alors ; j’étais libre de moi, je n’avais de devoirs qu’envers moi.
Il pensait :
— N’est-ce rien ?
Il n’osa point le lui dire.
— Mais vous le regrettez pourtant ? fit-il avec instance.