Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/100

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chenapans. Ou de saintes-nitouches. — Les deux espèces, Annette les a dans son enclos. Mais atténuées. Le vieux vin a trop de bouteille.

Et d’abord, ce qui la frappe en ces figures de garçonnets, à l’âge ingrat, ossues, mafflues, irrégulières, taillées à la serpe, poussées de travers, ce sont deux traits : rudesse et ruse. Ils sont du terroir. Le long nez Valois, qui dévie, les yeux, petits, brillants, bridés, les plis précoces aux tempes quand ils rient, et la gueule de renardeau, canines jaunes, qui avance de côté, pour rigoler, ou pour ronger — une gomme, les ongles, ou une boulette de papier… Annette, dans sa chaire, se voit chasseur en face de terriers. Chasseur, ou chassé ? D’eux eu d’elle, qui sera le gibier ? Ils et elle se guettent. Il faut avoir le doigt toujours sur la gâchette. Gare au premier qui baisse les yeux !

C’est eux. — Après un premier examen, dévisagement, ricanements, bourdonnements, coups de coude à défoncer les côtes, les paupières sont descendues. Mais l’œil est tapi, à l’affût. Et c’est encore pis ! On ne peut l’atteindre, et il vous tient ; il ne laisse rien passer de vos mouvements, sans les souligner d’une grimace, qui se communique à l’autre bout de la classe, comme un sans-fil. Ils ont l’air immobiles, innocents (aux deux sens) ; mais leurs jambes se tortillent sous la