Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/183

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déchirures des meubles et des rideaux… Ils n’avaient respecté rien. Les meilleures couvertures, la literie, avaient été sans façons enlevées de la chambre d’Annette, pour servir aux envahisseurs. Les portraits, les gravures, dont elle avait fait son horizon domestique, avaient été déplacés, remplacés, les uns posés par terre, tournés contre le mur, les autres portés en tas dans le cabinet de débarras. Apolline y avait substitué des photos de famille, des gueules ahurissantes, et des bondieuseries. Même les livres, les papiers, — hors ceux que défendaient les rares tiroirs fermés à clef — avaient été touchés, moins par curiosité, (Apolline ne lisait point), que par désœuvrement et par fièvre des doigts : leur trace était inscrite aux mouillures des feuilles et aux pages cornées. Dans toutes les pièces traînait une odeur de terrier. — Marc, dégoûté, furieux, parlait de jeter les fouines dans l’escalier. Annette tâcha de le calmer. Elle fît à Apolline quelques observations sévères, qui furent mal reçues ; et, dès les premiers mots, elle fut arrêtée par le sentiment oppressant du désarroi d’esprit, de la crise tragique, au plein desquels elle tombait.

Le frère et la sœur se fuyaient. Il semblait qu’il y eût entre eux hostilité, aversion, colère, ou peur. Le retour subit d’Annette les obligea à faire de nouveau chambre commune. On entendit,