Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/42

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Ils sont partis, les huit guerriers. Et ceux qui restent retiennent leur souffle, pour entendre au loin leurs pas. Les rues bruissent. Mais sur les cœurs, dans la maison, pèse, la nuit, un silence tragique.

Annette est calme. Elle n’y a point de mérite, n’ayant rien à risquer. Elle le sait, et elle en est humiliée. Si elle était homme, nul doute qu’elle ne parte, sans hésiter ! — Serait-elle aussi ferme, si son fils avait cinq ans de plus ?… Qui sait ? Elle dirait que cette pensée lui fait injure. Une rougeur au front, de colère contre soi, elle est femme à regretter qu’elle ne puisse jeter, avec soi, dans le jeu, tout ce qu’elle aime… Regretter, oui, peut-être… Mais le jeter ?… Vraiment ?… Elle en est sûre ?… Ayons l’air de le croire ! Si on la démentait, elle froncerait son sourcil de Junon courroucée. — Mais quand le jeune garçon vient à passer près d’elle, il faut qu’elle se réprime,