Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/74

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

demi décidés… Garçon, ou fille ?… Et l’on ne sait pas encore si l’on voudrait la fille, pour l’être, ou pour la posséder.

Il rentrait, un soir, assez tard, avec sa mère. Il vit — il crut voir — dans la rue mal éclairée, les prunelles brillantes… Clarisse passait, escortée. Il eut un :

— Ah !

de surprise, et il baissa les yeux, par une pudeur bizarre, afin qu’elle ne pût savoir qu’il l’avait vue. Annette, qui avait entendu son exclamation, lui demanda pourquoi. Il se hâta de détourner l’attention. Il lui semblait qu’il eût le devoir de protéger Clarisse. Mais après, il se reprocha de n’avoir pas bien regardé. Était-ce elle ? Il n’était plus sûr. Il la dévorait… Elle ? Non. La femme inconnue.

Cette obsession gonflait ses nuits. Elle ruisselait de cette maison, de l’atmosphère de cette ville en guerre, comme une terre en chaleur, sous le couvercle d’un ciel d’orage, chauffé à blanc. L’attente, l’inquiétude, l’ennui, le deuil, la mort, allumaient le désir. Clarisse n’était pas la seule de ces âmes possédées.

La fille de Perret ne rentre plus au logis ; le père n’est plus là pour veiller aux braconniers ; et, le gibier levé, la mère n’a rien su de mieux que crier et jeter la fille à la porte. Et de cela,