Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 4.djvu/18

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rougi par le rhume et le vent, ses yeux, son nez gonflés ; et elle en eut dépit. Mais ce ne fut qu’une ombre. Elle haussa l’épaule, et elle rit.

Le train pour Château-d’Œx partait dans la matinée. Elle éveilla le dormeur. Franz ne s’étonna point, quand il la vit près de son lit. Ce petit sauvage avec les femmes ! Annette n’était déjà plus pour lui une femme ; elle était à son service. Qu’elle s’occupât de lui, il le trouvait naturel. Il était prompt à donner sa confiance, — prompt aussi à la retirer. — Quand elle lui dit qu’ils seraient, le soir, près de l’ami, son visage mobile s’assombrit : si proche du but, il avait peur !… Puis, l’impatience le prit ; et, précipitamment, il sauta du lit, s’habilla, sous les yeux d’Annette : elle ne comptait pas pour lui.

Ils quittèrent l’hôtel. Il lui laissait tout faire, payer, prendre les billets, chercher le train, choisir les places ; il ne l’aidait même pas à porter son paquet. Mais il s’arrêta pour lui acheter un bouquet de violettes. Il était dénué de sens pratique et même de résistance ; le flot des voyageurs le bousculait sur le quai ; si Annette ne se fût retournée peur lui faire signe et l’attendre, il l’eût perdue. Il était l’homme qui n’est jamais à ce qu’il fait.