Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 4.djvu/25

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l’autre, maintenant, ils n’osaient plus les livrer. Franz était le plus indiscret. Dès l’instant qu’il avait pris confiance en elle, il n’était rien de lui qu’il ne confiât. Il disait tout ce qu’on a coutume de taire.

Annette ne s’y trompait point. Elle savait que Franz et Germain ne se livraient pas à elle, parce qu’elle était Annette, mais parce qu’elle était là, près d’eux, une femme anonyme, et qu’il leur fallait une oreille complaisante et sûre à qui s’abandonner. Ce n’était en rien la marque d’une affection pour elle. Ils étaient uniquement occupés l’un de l’autre, et de soi. Mais malgré qu’elle le sût, elle se laissait envelopper du souffle envahissant de cette étrange intimité. Les rayons invisibles de leur amour mutuel, pour aller de l’un à l’autre, passaient au travers d’elle.

Franz disait à Annette — (ils se promenaient ensemble) :

— Je l’aime. Je n’aime que lui. Je ne peux le lui dire. Il prend un regard sévère. Il ne le permet pas. Il ne peut pas souffrir, dit-il, la sentimentalité… Ce n’est pas de la sentimentalité ; il le sait, il sait bien ce que je pense ; mais il lui déplaît de l’entendre. Il dit que ce n’est pas sain,