quel point les hommes d’argent deviennent indifférents à tout, sauf à l’argent. Tel le Midas antique, qui, tout ce qu’il touchait, ses doigts le faisaient métal… Ne leur attribuez pas de vastes plans ténébreux ! Ils ne voient pas si loin ! Ils visent à amasser au plus vite et le plus gros. Ce qui culmine en eux, c’est l’égoïsme antisocial, qui est la plaie du temps. Ils sont simplement les hommes les plus représentatifs d’une époque asservie à l’argent. Les intellectuels, la presse, les politiciens, — oui, même les chefs d’État, ces fantoches de guignols tragiques, sont, qu’ils le veuillent ou non, devenus leurs instruments, leur servent de paravent[1]. Et la stupidité des peuples, leur soumission fataliste, leur vieux fond ancestral de sauvagerie mystique, les livrent sans défense au vent de mensonge et de folie qui les pousse à s’entre-tuer…
Un mot inique et cruel prétend que les peuples ont toujours les gouvernements qu’ils méritent. S’il était vrai, ce serait à désespérer de l’humanité : car quel est le gouvernement à qui un honnête homme voudrait donner la main ? Mais il est trop évident que les peuples, qui travaillent, ne peuvent suffisamment contrôler les hommes qui les gouvernent ; c’est bien assez qu’ils aient toujours à en expier les erreurs ou les crimes, sans les en rendre, par surcroît, responsables ! Les
- ↑ Citons ici quelques lignes de Maurras, si lucide quand il ne se livre pas en proie à son idée fixe :
« L’État-Argent administre, dore et décore l’Intelligence : mais il la musèle et l’endort. Il peut s’il le veut, l’empêcher de connaître une vérité politique, et, si elle la dit, d’être écoutée et entendue. Comment un pays connaîtrait-il ses besoins, si ceux qui les connaissent peuvent être contraints au silence, au mensonge ou à l’isolement ? » (L’Avenir de l’Intelligence.)
Tableau véridique, du présent !