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Page:Rolland - Pages immortelles de J. J. Rousseau.djvu/155

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profession de foi du vicaire savoyard

songez que les vrais devoirs de la religion sont indépendants des institutions des hommes ; qu’un cœur juste est le vrai temple de la Divinité ; qu’en tout pays et dans toute secte, aimer Dieu par-dessus tout et son prochain comme soi-même, est le sommaire de la loi ; qu’il n’y a point de religion qui dispense des devoirs de la morale ; qu’il n’y a de vraiment essentiels que ceux-là ; que le culte intérieur est le premier de ces devoirs, et que sans la foi nulle véritable vertu n’existe.

Fuyez ceux qui, sous prétexte d’expliquer la nature, sèment dans les cœurs des hommes de désolantes doctrines, et dont le scepticisme apparent est cent fois plus affirmatif et plus dogmatique que le ton décidé de leurs adversaires. Sous le hautain prétexte qu’eux seuls sont éclairés, vrais, de bonne foi, ils nous soumettent impérieusement à leurs décisions tranchantes, et prétendent nous donner pour les vrais principes des choses les inintelligibles systèmes qu’ils ont bâtis dans leur imagination. Du reste, renversant, détruisant, foulant aux pieds tout ce que les hommes respectent, ils ôtent aux affligés la dernière consolation de leur misère, aux puissants et aux riches le seul frein de leurs passions ; ils arrachent du fond des cœurs le remords du crime, l’espoir de la vertu, et se vantent encore d’être les bienfaiteurs du genre humain. Jamais, disent-ils, la vérité n’est nuisible aux hommes ; je le crois comme eux,