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Page:Rolland Clerambault.djvu/176

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la pureté de ses intentions, il le présentait sous un jour déshonorant. Historien habitué à manipuler les textes, il détachait de la brochure de Clerambault quelques phrases tronquées, et il les brandissait, comme un acte de trahison. Sa vertueuse indignation ne se fût point satisfaite d’une lettre privée ; elle avait fait choix du plus bruyant journal, basse officine de chantage, dont un million de Français méprisaient, mais avalaient les bourdes, bouche bée.

— Ce n’est pas possible ! balbutiait Clerambault, que cette animosité inattendue trouvait sans défense.

— Pas un instant à perdre ! dit Camus. Il faut répondre.

— Répondre ? Que puis-je répondre ?

— D’abord, naturellement, démentir cette ignoble invention.

— Mais ce n’est pas une invention, dit Clerambault, en relevant la tête et regardant Camus.

Ce fut au tour de Camus d’être frappé de la foudre.

— Ce n’est pas… ? Ce n’est pas… ? bégaya-t-il, de saisissement.

— La brochure est de moi, dit Clerambault ; mais le sens en est dénaturé par cet article…

Camus n’avait pas attendu la fin de la phrase pour hurler :

— Tu as écrit ça, toi, toi !…

Clerambault, essayant de calmer son beau-frère, le priait de ne pas juger avant de savoir exactement. Mais l’autre le traitait, à tue-tête, d’aliéné, et criait :