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Page:Rolland Clerambault.djvu/316

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ché de le prévenir, ils le leur attribuèrent. Chaque recul d’armée, chaque bévue de diplomates, se découvrit une excuse dans les machinations des pacifistes. Ces hommes impopulaires et que nul n’écoutait se trouvèrent investis par leurs adversaires du pouvoir formidable d’organiser la défaite. Pour que nul ne s’y trompât, on leur passa au cou l’écriteau : « Défaitiste » ; comme les hérétiques du bon vieux temps, leurs frères, il ne restait plus qu’à les brûler. En attendant le bourreau, ses valets ne manquaient point.

On commença par prendre, pour se faire la main, des gens inoffensifs — des femmes, des instituteurs, obscurs, ou peu connus, sachant mal se défendre. — Et puis, on s’attaqua à de plus gros morceaux. L’occasion était bonne pour les hommes politiques de se débarrasser de rivaux dangereux, détenteurs de secrets redoutables et maîtres du lendemain. Surtout, on s’appliqua, selon la vieille recette, à mêler savamment les accusations, cousant en un même sac de vulgaires aigrefins et ceux dont le caractère ou l’esprit inquiétaient, — afin qu’en ce micmac le public éberlué n’essayât même plus de distinguer un brave homme d’un gredin. Ainsi, ceux qui n’étaient pas suffisamment compromis par leurs actes l’étaient par leurs relations. En manquaient-ils, on pouvait leur en prêter : on se chargeait même, au besoin, de leur en fournir de toutes faites sur mesure de l’acte d’accusation.

Pouvait-on assurer que Xavier Thouron était, quand il vint trouver Clerambault, en service commandé ? Il était bien capable de venir pour son propre compte. Et