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Page:Rolland Clerambault.djvu/365

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nement fût inspiré par le gouvernement : les politiciens avisés savent, à l’occasion, se faire forcer la main, pour accomplir ce qu’ils veulent, mais dont ils ne sont pas fiers. L’arrestation de Clerambault semblait donc imminente. Moreau et son ami se montraient inquiets. Clerambault leur fit signe de se taire, en présence de sa femme ; et après avoir causé quelque temps de l’événement du jour, sur un ton de plaisanterie, il les emmena dans son cabinet. Il leur demanda ce qui les troublait. Ils lui montrèrent un article haineux de la feuille nationaliste, qui depuis des semaines s’acharnait contre Clerambault. Mise en goût par la manifestation du soir, elle convoquait ses amis, pour la renouveler le lendemain. Moreau et Gillot prévoyaient des scènes de violence, quand Clerambault se rendrait au Palais ; et ils venaient l’engager à ne pas sortir de chez lui. Connaissant son caractère timide, ils pensaient n’avoir pas besoin d’insister. Mais pas plus que le jour où Moreau l’avait trouvé discutant au milieu d’un attroupement, Clerambault n’avait l’air d’entendre.

— Ne pas sortir ? Pourquoi donc ? Je ne suis pas souffrant.

— Ce serait plus prudent.

— Cela me fera du bien, au contraire.

— On ne sait pas ce qui peut arriver.

— On ne le sait jamais. Il est assez temps, lorsque c’est arrivé.

— Enfin, pour parler franc, il y a du danger. Depuis trop longtemps, on les excite. Vous êtes haï.