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Hændel se vit aussitôt abandonné par les amis de la veille. Son associé Heidegger, propriétaire du théâtre Haymarket, loua la salle à l’opéra rival, et Hændel, chassé de la maison pour laquelle il travaillait depuis quatorze ans, dut émigrer avec sa troupe chez John Rich[1], au Covent-Garden, — une sorte de music-hall, où l’opéra habitait en co-locataire avec toutes sortes d’autres spectacles : ballets, pantomimes, arlequinades. Dans la troupe de Rich se trouvaient des danseurs français, parmi lesquels la Sallé[2], qui venait de soulever l’enthousiasme du public anglais avec deux tragédies dansées : Pygmalion et Bacchus et Ariadne[3]. Hændel, qui connaissait depuis longtemps l’art français[4], vit le
- ↑ C'était John Rich, qui avait monté à son théâtre, en 1728, le Beggar’s Opera de Gay et de Pepusch, — cette parodie des opéras de Hændel.
- ↑ Elle était élève de Mlle Prévost, et avait débuté chez Rich, en 1725. Voir l’étude de M. Emile Dacier : Une danseuse française à Londres, au début du XVIIIe siècle. (Bulletin français de la S. I. M., mai et juillet 1907.)
- ↑ On remarquera que ce fut avec ces mêmes sujets de Pygmalion et d’Ariadne que J.-J. Rousseau et George Benda inaugurèrent en 1770-1775 le mélodrame ou « opéra sans chanteurs ».
- ↑ On l’accusait même de le trop bien connaître. L’abbé Prévost écrivait, précisément à la même époque, dans le Pour et le Contre, en 1733 : « … Quelques critiques l’accusent d’avoir emprunté le fond d’une infinité de belles choses, de Lully, et surtout de nos cantates françaises, qu’il a l’adresse, disent-ils, de déguiser à l’italienne… »