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le théâtre nouveau

souci d’émotions variées, de réalisme vrai, de moralité simple, et de probité commerciale mutuelle, que le peuple apporte en passant aux contrôles, et dont il convient que tout auteur dramatique se souvienne, s’il veut faire du « théâtre populaire » proprement dit ».


1o Souci d’émotions variées : Le public populaire vient au théâtre pour « sentir », et non pour « apprendre » ; et comme il s’abandonne entièrement à ses émotions, il veut qu’elles soient diverses ; car la tristesse ou la gaieté continue tend trop son esprit ; il veut se reposer des larmes dans le rire, et du rire dans les larmes.


2o Souci de réalisme vrai : Une des raisons du succès de tel ou tel mélodrame est dans l’illusion d’exactitude que lui cause la reconstitution épisodique de tel ou tel milieu réel, et connu de lui : un cabaret, un mont-de-piété, un marché, etc.


3o Souci de moralité simple : Un public populaire a besoin, je ne dirai pas par naïveté, mais par santé, de trouver au théâtre un appui à « l’intime conviction, que chacun a au fond de lui, d’une victoire définitive du Bien », et qu’il a raison d’avoir ; car elle est une force presque nécessaire à la vie, et la loi du progrès.


4o Souci de probité commerciale, « parce qu’il y a en effet une probité, — de la part des directeurs et des auteurs, — à ne pas voler le public en le tenant enfermé quatre heures, pour lui donner une heure trois quarts de spectacle », et que le peuple vient au théâtre, pour voir la pièce, et non, comme l’élite, pour voir la salle, — pour avoir des émotions tragiques, et non pour parader, médire et flirter.

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