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LES ESSAIS û'OPÉUA POPULAIRE EN ITALIE. 157

seurs , pouvait difficilement répondre aux pensées du peuple ita- lien du dix-septième siècle. La mélancolie, la sérénité, les viriles passions des héros grecs, ne pouvaient trouver un écho dans l'élite efféminée, dans la foule à la fois surexcitée et endormie, dans cette race bruyante, superficielle, facilement amusée, indif- férente au fond. Tout au plus l'aristocratie pouvait-elle sentir la langueur païenne des Orfeo et des Dafné ; et la foule se divertir de leurs féeries mythologiques. Elles n'allaient ni l'une ni l'autre, au fond d'un art qui n'était pas fait pour elles, mais seulement pour quelques esprits délicats, et pour les salons où ils donnent le ton.

En revanche, leur amour de la vie et de l'intrigue, leur vue ra- pide et moqueuse, leur force de belle humeur, et leur talent natu- rel à saisir, railler et singer les ridicules extérieurs, demandaient une expression artistique, que la paresse seule les empêchait de trouver. Elle devait triompher au dix-huitième siècle dans V Opéra buffa, l'une des formes les plus parfaites de l'esprit italien. Nous le voyons naître au dix-septième siècle dans une suite d'essais, qui se complètent et s'achèvent.

On a l'habitude d'écrire que la comédie musicale naquit à Na- ples en 1709 (1). C'est une erreur. Non seulement il y eut avant 1660 des comédies musicales à Florence, mais la vis comica ita- lienne ne réussit jamais à s'imposer complètement silence au mi- lieu des tragiques douleurs de l'opéra. On voyait peu à peu s'en- rouler autour de la noble plante de serre ,. une petite ronce rustique et gaillarde, qui si profondément y enfonça ses pri- ses , que toute la vie de l'opéra finit par passer goutte à goutte en ses veines (2).

Moins de dix ans après l'apparition du premier opéra véritable

��(1) D'après le D r Michèle Scherillo {Sloria letteraria delV Opéra buffa Na- politana, dalle origini al principio del secolo XIX. Naples, Tipogr. reale, 1883), le premier opéra buffa est il Patro Calienno de la Costa, représenté au théâtre dei Fiorentini, le 8 octobre 1709, « graziosa e piaciutissima commedia in musica, tutta in lingua napolitana. » {Gazzetta napolitana. Bibl. Naz. de Naples.)

D'après J.-L. Klein {Geschichte des Dramas. Leipzig, 1860-1874) et Napoli- Signorelli , c'est La Fenzuine abbentorate do Francosco Antonio Tullio, en 1710.

Scherillo analyse dans son livre II Patro Calienno, et devient très utile pour l'histoire à partir de cette date.

(2) On a vu que la comédie est déjà l'unie du madrigal dramatique do Vccchi et de Banchicri.

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