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les essais d'opéra populaire en italie. 195

siècle, en musique comme en poésie, cette morne et puissante douleur qui sait qu'elle est nécessaire, cette grandeur résignée dans l'amertume profonde, telle qu'elle s'exprime dans l'Amazone vaincue par la Divinité. (« Se la caduta mia ne'cieli fu stabilita, non risorgo piu. ») Combien ne faut-il pas regretter le dévelop- pement tardif de la musique, lorsque l'on entrevoit sous ses ma- ladresses, et avec des ressources si incomplètes, la même supé- riorité d'âme qui resplendit dans les autres arts au dix-septième siècle !

La grâce de mélancolie qui rend Provenzale si attrayant est toujours sobre et discrète, plus que l'art même de Bach. Il serait puéril de comparer la richesse débordante de celui-ci au petit nombre d'oeuvres que nous connaissons de l'autre. Mais si l'ima- gination est incomparablement plus puissante chez Jean Sébas- tien, la raison est plus forte chez le vieux Napolitain , et le cœur n'est peut-être pas moins grand. J'espère qu'on ne m'en voudra point d'avoir tâché de faire revivre, d'une façon qui semblera un peu partiale, un grand artiste disparu dans l'oubli. Si peu connu encore , il sera tout aussitôt un ami pour ceux qui auront une fois entendu quelques-uns de ses chants. Ils verront reparaître cette figure d'un charme sérieux et profond : tel le ravissant pré- lude qui prépare au Schiavo , semblable à deux yeux souriants dans un grave visage (1).

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��La parfaite sobriété de cet art, qui ne dit rien de trop, qui ne parle jamais pour parler, mais qui va jusqu'au bout de sa pensée, sans en atténuer la force et l'austérité par complaisance pour les faiblesses du public, marque dans l'histoire de la musique italienne, comme dans celle de l'Opéra, une époque unique, presque aussitôt dépassée. Les Scarlatti vont paraître, et avec

��sole l'âme endolorie de ses péchés; — ou l'air de Ménalippa : « lasciatemi morir » (acte I, scène 8 du Schiavo), avec quoique chose de plus grandiose encore (l'Amazone do Polyclète). — D'autres pages font songer à Gluck ou à Maendel facte III, scène 2 de Stellidaura , air d'Orismondo); un petit nombre à Wagner (au Wagner de Parsifal. — Rôle de.Timanto).

Les harmonies sont souvent hardies, d'une dureté expressive.

Les partitions sont écrites pour voix, 2 parties de violons, et basse.

(1) On le retrouvera à la fin du volume, avec quelques-uns des plus boaux airs de Provenzale. — Nous avons fait entendre cetto annéo, à un concert, quelques fragments du Schiavo et do Stellidaura.

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