Aller au contenu

Page:Rolland Les origines du théâtre lyrique moderne.djvu/79

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

L ANTIQUITÉ ET LE DRAME LYRIQUE FLORENTIN. 65

quent par l'unité de l'œuvre. Un seul homme était alors poète et musicien (1). Au son d'un seul instrument, il chantait ses œu- vres personnelles. Aristoxène, Ptolémée, Euclide, nous montrent de plus, qu'ils n'usaient pas de toutes nos consonnances; leur oreille plus délicate était blessée d'harmonies qui nous char- ment ; nos consonnances imparfaites (tierces et sixtes) étaient dissonances pour eux. Il en résulte que notre musique est maté- riellement plus riche que la musique ancienne: mais l'esprit en est beaucoup plus pauvre.

« Il n'est pas étonnant qu'un seul homme , à la fois musicien et poète excellent, chantant et récitant, au son d'un unique instrument à quatre cordes, des choses conformes au goût et à la nature de son public, ait fait sur lui l'impression que nous avons dite : les choses simples s'impriment plus fortement en nous que les choses complexes » (2).

C'est donc un retour vers la simplicité que veulent les nova- teurs ; et , comme tous les novateurs , c'est au nom de la nature qu'ils veulent accomplir leur réforme, sans s'apercevoir que re- chercher la simplicité d'un autre âge est un raffinement de plus; ils ne craignent pas d'appauvrir l'art en le privant des ressources devenues légitimes et naturelles par l'usage. Gela est si vrai que, dès qu'il se trouvera des musiciens de génie parmi les novateurs, loin de renoncer au bénéfice des nouvelles découvertes , ils re- viendront puiser à ces richesses de l'harmonie et de l'instrumen- tation, et leur feront une place plus large encore.

Il ne semble pas que l'Académie de Bardi ait eu dès l'abord claire conscience de l'œuvre qu'elle avait à accomplir, ni même qu'elle se soit laissé convaincre par les théories de Galilei (3). En 1589, aux fêtes de Florence (4) , nous trouvons à la tête des spec- tacles musicaux Giov. Bardi lui-même, et ses amis, Rinuccini, Péri, E. de Gavalieri, peut-être Gaccini. Cependant, il n'y a là

��démoniens ; de Clinias, dans Athénée, qui calme ses accès de colère aux sons do la cithare, etc.

(1) Ils s'appuient sur Strabon, Horace, Plutarque, Pline, Hist. Nal., V, 6.

(2) a Non è gran cosa, che un musico solo, e poeta eccellente al suono diun solo Instromento di quattro o piu corde, cantasso e recitasse cose conformi alla natura, et volontà dogli ascoltanti , e in loro si immutasse il senso, e facessc quegli effetto , che gia habbiamo detto, massime cho ne' sensi si imprimono le cose piu semplici, piu facilmente che le miste. » (Artusi, 13.)

(3) Il est curieux du reste que Galilei ait publié, non ses monodies, mais ses madrigaux à 4 et 5 voix. Primo libro , Venise, Gardane, 1574. Socondo libro, Venise, Gardane, 1587.

(4) Voyez chapitro II.

5

�� �