Aller au contenu

Page:Rolland Les origines du théâtre lyrique moderne.djvu/80

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

66 LES ORIGINES DU THÉÂTRE LYRIQUE MODERNE.

rien encore qui annonce le nouveau style dont ils vont se faire les champions, et les intermèdes de la comédie sont de purs ma- drigaux à 3, 4, 5, 6, 8 voix, des dialoghi pour 12, 15, 18, 30 voix, des morceaux instrumentaux ou sinfonie à six. parties , et des ballets.

Ce fut Galilei, qui, le premier, joignant l'exemple à la théorie, fit entendre le chant en « style représentatif, » comme on dit à l'époque. Piero Bardi, dans sa lettre du 16 décembre 1634 à Doni (1), dit que « dans cette tentative si difficile et jugée presque ridicule (« stimata quasi cosa ridicolosa »), il fut surtout aidé par son père, le comte de Vernio, et qu'ils passèrent des nuits entières à cette recherche. Pour mieux affirmer son intention dramatique, Galilei s'attaqua à une des pages les plus célèbres de la poésie mo- derne, à la scène d'Ugolin de la Divine comédie (2). Il la mit en musique , et la chanta lui-même , en s'accompagnant sur la viole (3). Galilei était beau; sa voix était passionnée; il semble que sa musique, un peu dure (4), fût expressive ; elle eut grand

��(1) Doni est le plus important des historiens à consulter pour la réforme musicale de Florence. Il faut surtout recourir à ses Trattati di Musica, 1763 (comprenant un « Trattato délia musica scenica, » neuf discours sur le même objet, un discours de Giovanni Bardi « sopra la musica antica e il cantar bene ; » un autre de Pietro délia Valle, « délia musica del' età nostra, che non è punto inferiore, anzi e migliore di quella dell' eta passata, » etc.). C'est le deuxième volume des Trattati. — On doit seulement reprocher à l'auteur un peu trop de patriotisme florentin, qui le rend injuste pour les artistes des autres pays.

J. B. Doni, né à Florence en 1593 , mort en 1647, fit cinq ans d'études en France, à Bourges, à l'école de Cujas (1613-1618). Il fut docteur à l'Univer- sité de Pise, étudia les langues orientales, les sciences naturelles et la phi- lologie. Deux fois encore il revint en France, en 1621, avec le cardinal- légat Ottavio Corsini; un peu plus tard, avec le cardinal Barberini. Il y forma de solides amitiés, en particulier avec le Père Mersenne. Secrétaire du Sacré-Collège, puis, vers 1640, professeur d'éloquence à Florence, acadé- micien de la Crusca, il écrivit des dissertations sur la musique, et imagina même une lyre, dite Lyra Barberina, qu'il dédia à Urbain VIII. Ce lui fut un prétexte à d'intéressantes études sur les instruments à cordes de l'anti- quité. — Le plus important de ses écrits ne fut publié qu'un siècle après sa mort. La Bibl. Nat. de Paris possède quelques manuscrits de lui.

(2) Ce premier essai du drame lyrique ne nous est malheureusement pas parvenu, non plus que les autres œuvres monodiques de Galilei. Dernière- ment encore, Verdi le faisait vainement rechercher.

(3) « Galilei sopra un corpo di viole esattamente suonate , cantando un tenore di buona voce, e intelligibile, fece sentire il lamento del conte Ugo- lino di Dante. » (Lettre de Bardi.)

(4) « Una certa rozzezza, e troppa antichità. » (Lettre de Bardi.)

�� �