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la vie de Michel-Ange

puis se leva, et dit : « L’œil est tel que je l’ai dessiné, et la nature le montre ainsi. » — « Eh bien donc, fit Michel-Ange en riant, c’est une faute de la nature. Continue, et ne ménage pas la couleur. »[1]

Tant d’indulgence, dont Michel-Ange n’était pas coutumier avec les autres hommes, et qu’il prodiguait à ces petites gens, ne suppose pas moins d’humour railleuse qui s’égaye des ridicules humains,[2] que d’affectueuse pitié pour ces pauvres fous qui se croyaient de grands artistes et qui lui inspiraient peut-être un retour sur sa propre folie. Il y avait là bien de l’ironie mélancolique et bouffonne.

  1. Vasari.
  2. Comme presque toutes les âmes sombres, Michel-Ange avait parfois l’humeur bouffonne ; et il écrivit des poésies burlesques, dans le goût de Berni. Mais sa bouffonnerie reste toujours rude, et tout près du tragique. Ainsi, sa lugubre caricature des infirmités de l’âge. (Poésies, LXXXI) Voir aussi sa parodie d’une poésie d’amour. (Ibid., XXXVII)
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