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la vie de Michel-Ange

Puis, ce fut le fondeur, dont l’incapacité se révéla.

« J’aurais cru que maître Bernardino était capable de fondre, même sans feu, tant j’avais foi en lui. »

En juin 1507, la fonte rata. La figure ne sortit que jusqu’à la ceinture. Tout fut à recommencer. Michel-Ange resta occupé à cette œuvre jusqu’en février 1508. Il faillit y perdre la santé.

« J’ai à peine le temps de manger, écrit-il à son frère… Je vis dans la plus grande incommodité et dans une peine extrême ; je ne pense à rien autre qu’à travailler nuit et jour ; j’ai enduré de telles souffrances, et j’en endure de telles, que je crois que si j’avais la statue à faire encore une fois, ma vie n’y suffirait pas : ç’a été un travail de géant. »[1]

Pour de telles fatigues, le résultat fut misérable. La statue de Jules II, élevée en février 1508 devant la façade de San Petronio, n’y resta que quatre ans. En décembre 1511, elle fut détruite par le parti des Bentivogli, ennemis de Jules II ; et Alphonse d’Este en acheta les débris, pour s’en faire un canon.

Michel-Ange revint à Rome. Jules II lui imposait une autre tâche, non moins inattendue et plus périlleuse encore. Au peintre, qui ne savait rien de la technique de la fresque, il ordonnait de peindre la voûte de la chapelle Sixtine. On eût dit qu’il se plaisait à commander l’impossible, et Michel-Ange à l’exécuter.

  1. Lettres à son frère, du 29 septembre et du 10 novembre 1507.
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