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LA FORCE

Le pape s’irritait de ses lenteurs et de son obstination à lui cacher son travail. Leurs caractères orgueilleux s’entrechoquaient comme des nuées d’orage. « Un jour, dit Condivi, Jules II lui ayant demandé quand il aurait fini la chapelle, Michel-Ange lui répondit, selon son habitude : « Quand je pourrai. » Le pape, furieux, le frappa de son bâton, en répétant : « Quand je pourrai ! Quand je pourrai ! » Michel-Ange courut chez lui et fit ses préparatifs pour quitter Rome. Mais Jules II lui dépêcha un envoyé, qui lui apporta 500 ducats, l’apaisa aussi bien qu’il put, et excusa le pape. Michel-Ange accepta les excuses. »

Mais le lendemain, ils recommençaient. Le pape finit, un jour, par lui dire avec colère : « Tu as donc envie que je te fasse jeter en bas de ton échafaudage ? » Michel-Ange dut céder ; il fit enlever l’échafaudage, et découvrit l’œuvre, le jour de la Toussaint 1512.

La fête éclatante et sombre, qui reçoit les reflets funèbres de la Fête des Morts, convenait bien à l’inauguration de cette œuvre terrible, pleine de l’Esprit du Dieu qui crée et qui tue, — Dieu dévorant, où se rue, comme un ouragan, toute la force de vivre.[1]

  1. J’ai analysé l’œuvre dans le Michel-Ange, de la collection : Les Maîtres de l’Art. Je n’y reviens pas ici.
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