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DES ODES.

Flatté du ſon de ta corde ſi douce.
Celuy ne vit le cher-mignon des Dieux,
A qui deſplaiſt ton chant melodieux,
Heureuſe Lyre honneur de mon enfance :
Ie te ſonnay deuant tous en la France
De peu à peu : car quand premierement
Ie te trouuay tu ſonnois durement,
Tu n’auois fuſt ny cordes qui valuſſent,
Ne qui reſpondre aux loix de mon doit peuſſent.
Moiſi du temps ton bois ne ſonnoit point,
Lors i’eu pitié de te voir mal-en-point,
Toy qui iadis des grands Rois les viandes
Faiſois trouuer plus douces & friandes.
Pour te monter de cordes & d’vn fuſt,
Voire d’vn ſon qui naturel te fuſt,
Ie pillay Thebe, & ſaccageay la Pouille,
T’enrichiſſant de leur belle deſpouille.
Lors par la France auec toy ie chantay,
Et ieune d’ans ſus le Loir inuentay
De marier aux cordes les victoires,
Et des grans Rois les honneurs & les gloires.
Iamais celuy que les belles chanſons
Paiſſent rauy de l’accord de tes ſons,
Ne ſe doit voir en eſtime pour eſtre
Ou à l’eſcrime ou à la luitte adeſtre :
Ny marinier fortuneux ne ſera,
Ny grand guerrier iamais n’abaiſſera
Par le harnois l’ambition des Princes,
Portat veinqueur la foudre en leurs prouinces.
Mais ma Gaſtine, & le haut crin des bois
Qui vont bornant mon fleuue Vandomois,
Le Dieu bouquin qui la Neufaune entourne,

E vj