Page:Ronsard - Œuvres, Buon, 1587, tome 2.djvu/5

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
5
AV ROY.

Mais que dy-ie, à deſdain ! i’ay tant de confiance
En ta graue douceur, que ta magnificence
D’un ſourci deſdaigneux ne refuſera pas
Mon ouurage donné, tant ſoit-il humble & bas :
Imitateur des Dieux, qui la petite offrande
Prennent d’außi bon cœur qu’ils prennent la plus grande,
Et bien qu’ils ſoient Seigneurs, iamais n’ont à meſpris
Des pauuvres les preſeus tant ſoient de petit prix.
Ce fils de Iupiter ce foudre de la guerre,
Hercule, qui tua les Monſtres de la terre,
Allant pour eſtre fait d’Olympe citoyen,
Ne refuſa d’entrer au toict Molorchien :
Et meſme ce grand Dieu, qui la tempeſte iette,
De Bauce & Philemon entré dans la logette,
De deux ou trois fleurs ſon chef enuironna,
Que Bauce de bon cœur en preſent luy donna.
Tous les ans à ſa feſte en Libye honorée
Ne luy tombe vn Taureau à la corne dorée,
Mais ſouuent vn Aigneau : car ſa grande bonté
Ne prend garde aux preſens, mais à la volonté.
Ainſi ſuiuant les Dieux ie te ſuppli’de prendre
A gré ce petit don pour l’vſure d’attendre
Vn preſent plus parfait & plus digne d’vn Roy,
Que ia ma Calliope enfante dedans moy.
Ce-pendant ie priray ta puiſſance diuine,
Ainſi que Iupiter Callimache en ſon Hynne,
» Donne moy (ce dit-il) des vertus & du bien :
» Car la ſeule vertu ſans le bien ne ſert rien,
» Le bien ſans la vertu : ô Iupiter, aſſemble
» Tous ces deux poincts en vn, & ne les done enſemble.
Les vertus & les biens que ie veux receuoir

A iii