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Page:Ronsard - Œuvres, Buon, 1587, tome 2.djvu/4

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AV ROY.

Que s’il couroit fortune au milieu de l’orage,
Et ne ſe veut fier au tranquille viſage
Du Ciel ny de la mer pour ſe donner à l’eau
Que premier il n’ait bien calfeutré ſon vaiſſeau.
Ainſi apres auoir (la guerre eſtant finie)
De viures & de gens ta frontiere garnie,
Fait nouueaux baſtions, flanqué Chaſteaux & Forts,
Remparé tes Citez, fortifié tes ports :
Bref, apres auoir fait ce qu’vn Prince doit faire
Et en guerre & en païs vtile & neceſſaire
Pour tenir ton païs en toute ſeureté :
Sire, i’offenſerois contre ta Maieſté,
Si comme vn importun ie venois d’auenture
Entre-rompre tes jeux d’vne longue eſcriture,
Maintenant que tu dois pour quelque peu de temps
Apres mille trauaux prendre tes paſſe-temps
Pour retourner plus frais aux œuuvres de Bellonne.
Toutefois le deſir qui le cœur m’eguillonne
De te monſtrer combien ie ſuis ton ſeruiteur,
Me fait importuner ta Royale grandeur :
Et ſi en ce faiſant ie commets quelque vice,
Il vient du ſeul deſir de te faire ſeruice,
Qui preſſe mon deuoir de mettre vn œuuvre mien
Sous la protection de ton nom treſ-cheſtien,
Le ſacrant à tes pieds : C’eſt, Prince, vn liure d’Odes
Qu’autre-fois ie ſonnay ſuiuant les vieilles modes
D’Horace Calabrois, & Pindare Thebain,
Liure trois fois heureux, ſi tu n’as à deſdain
Que ma petite Lyre oſe entre tes trompettes
Rebruire les Chanſons de ces diuins Poëtes :
Et que mon petit Myrte oſe attoucher le rond
Des Lauriers, que la guerre a mis deſſus ton front.