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Page:Ronsard - Œuvres complètes, Garnier, 1923, tome 1.djvu/25

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xv
PIERRE DE RONSARD

Aux inspirations horatiennes et pindariques s’ajoutèrent bientôt celles qu’offrit à nos poètes la découverte d’Anacréon. Le recueil Érotique d’un anonyme alexandrin, imprimé par Henri Estienne en 1555 sous le nom du poète de Téos, vint enrichir leur art de ces thèmes mièvres et gracieusement colorés que les siècles suivants lui empruntèrent. Qui ne connaît chez Ronsard l’Amour piqué, l’Amour logé, l’Amour mouillé, et tant d’odelettes fines, qui lui firent assez tôt délaisser le pindarisme ? Mais toutes ses odes, quelles qu’en soient la forme et l’importance, ont un caractère commun et que partagent même certains sonnets. Ces poèmes ont été conçus par l’auteur pour être chantés, le plus souvent avec un accompagnement d’instruments à cordes, et l’on a les airs de ses musiciens, Certon, Janequin, Goudimel, plus tard Roland de Lassus. On ne doit pas oublier l’usage auquel il les destinait : « La poésie sans les instruments, disait-il, ou sans la grâce d’une seule ou plusieurs voix, n’est nullement agréable, non plus que les instruments sans être animés de la mélodie d’une plaisante voix. » Quand les poètes du temps parlent de leur luth et de la lyre qui résonne sous leurs doigts, ce sont des réalités qu’ils invoquent et non la banale image dont leurs successeurs abuseront. Déjà, pour Malherbe, ces mots n’offriront plus qu’une métaphore. Les odes de la Pléiade, au contraire, sont inséparables de la musique,