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Page:Ronsard - Œuvres complètes, Garnier, 1923, tome 1.djvu/24

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xiv
PIERRE DE RONSARD

brillante hardiesse. Il fortifie la langue et le style sans leur faire violence trop rude ; l’élan qui vise toujours les sommets, la constante recherche de la pensée la plus noble élargissent prodigieusement le domaine de la poésie.

L’idée antique de la gloire y apparaît déjà dans toute sa force. Ramenée dans le monde moderne par le grand Pétrarque et la prédication de toute sa vie, cette idée a exercé une influence puissante sur l’Italie du quattrocento ; elle a contribué à la transformation des mœurs de la Renaissance et à un changement dans la condition de l’écrivain. Nos humanistes, qui en furent nourris, l’ont transmise à Ronsard avec les textes anciens, qui font de la recherche de la renommée le principal mobile des actions humaines. C’est la souveraine récompense, et le plus haut des monarques lui-même a besoin d’une célébration écrite pour en être assuré. Dispensateur de la gloire, le poète peut donc se croire au-dessus de ceux qui la reçoivent de lui :

Si la plume d’un poète
Ne favorisait leur nom,
Leur vertu serait muette
Et sans langue leur renom…
La Muse l’enfer défie,
Seule nous élève aux deux,
Seule nous béatifie
Ennombrés au rang des Dieux.