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PIERRE DE RONSARD

« cartels », à mettre sa verve inventive au service de ses princes, comme cet autre humaniste, Ange Politien, le savait faire à Florence au siècle précédent pour ennoblir les plaisirs des ancêtres de Catherine de Médicis. Ce rôle de poète mêlé à la Cour et favori de Charles IX ajoute peu à peu à son prestige et fait apparaître en tout son éclat, aux yeux des autres pays de l’Europe, la royauté littéraire qu’il exerce dans le nôtre.

Son existence se trouvait assurée par une suffisante pension royale et les bénéfices d’église, qui étaient d’usage pour les gens de lettres de ce temps. Sans être prêtre, Ronsard en reçut sa part. Ses poèmes gardent le témoignage de requêtes insistantes et aussi de remerciements. Il jugeait que la fonction que remplit le poète mérite des avantages matériels et les réclamait pour ses amis tout autant que pour lui-même. C’est ici surtout qu’il est nécessaire de se placer dans le courant littéraire de la Renaissance pour comprendre sa pensée et lui éviter d’injustes reproches. En beaucoup de ses vers, par exemple, l’adulation purement verbale qu’il offre aux grands fait partie de la tradition classique. Elle lui semble de nulle conséquence et ne coûte rien à sa dignité. Si des mortels entrent dans l’Olympe et sont appelés parmi les dieux, c’est par son seul vouloir de poète, et les bienfaits qu’il sollicite d’eux en échange ne valent point à ses yeux l’honneur qu’il leur