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I. LIVRE DES AMOURS

Firent nicher Amour dedans mon sein,
Qui gros de germe avoit le ventre plein
D’œufs non formez qu’en nostre sang il couve.
Comment vivroy-je autrement qu’en langueur,
Quand une engence immortelle je trouve
D’Amours esclos et couvez en mon cœur ?


MURET Ces liens d’or.) La fiction de ce Sonet, comme l’autheur mesme m’a dit, est prinse d’une Ode d’Anacreon encores non imprimée, [elle l’était depuis 1554], qu’il a depuis traduite. Voy la xxii. Ode de son cinquième livre des Odes. Ce Sonnet est assez aisé de soy, et ne signifie autre chose, sinon qu’il est tout plein d’affections amoureuses. [Il est vray que le commencement est de Pétrarque 168. 1. 1604.]


VII

Bien qu’il te plaise, ingrate, d’allumer
Dedans mon cœur, siège à ta tyrannie,
Non d’une amour, ainçois d’une Furie
Le feu cruel pour mez oz consumer :
Le mal qui semble aux autres bien amer,
Me semble doux, comme n’ayant envie
De me douloir : car je n’aime ma vie,
Sinon d’autant qu’il te plaist de l’aimer.
Mais si les Cieux m’ont fait naistre, Madame,
Ton dédié, ne genne plus mon ame,
Pour ta victime offrant ma loyauté.
Tu dois, Maistresse, en tirer du service,
Non par l’horreur d’un cruel sacrifice
L’ensanglanter aux pieds de ta beauté.