Page:Ronsard - Œuvres complètes, Garnier, 1923, tome 3.djvu/281

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ODE XXXI.

J’avoy les yeux et le cœur
Malade d’une langueur
L’une à l’autre différente :
Tousjours une fièvre ardente
T-e pauvre cœur me brusloit.
Et tousjours l’œil distilloit
Une pluye catarreuse.
Qui s’escoulant dangereuse
Tout le cerveau m’espuisoit.
Lors mon cœur aux yeux disoit :

Le cœur.

C’est bien raison que sans cesse
L’ne pluye vangeresse
Lave le mal qu’avez fait :
Par vous seule entra le trait
Qui m’a la fièvre causée.
Lors mes yeux pleins de rosée,
En distillant mon souci
Au cœur respondoient ainsi.
 

Les yeux.

Mais c’est vous qui fustes cause
Du premier mal, qui nous cause
A vous l’ardente chaleur,
Et à nous l’humide pleur.
Il est bien vray que nous iusmes
Autheurs du mal, qui receusmes
Le trait qui nous a blessé :
Mais il fut si tost passé.
Qu’à peine tiré le vismes
Que ja dans nous le sentismes.
Vous deviez comme plus fort.
Contre son premier effort
Faire un peu de résistance :
Mais vous prinstes accointance
Tout soudain avecques luy