Page:Rosenthal - La Peinture romantique, 1900.djvu/16

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étriquées, aux plis cassants, l’ampleur des draperies de laine à l’antique (I). Il lui suffisait pour plaire de présenter une figure habilement modelée ; plus d’un tableau était simplement une académie.

Ainsi le cercle s’était resserré autour du peintre. Astreint à rechercher la beauté matérielle et à y créer le beau idéal, la plupart des sources d’inspiration lui étaient interdites. La nature morte et le paysage, parce que l’homme en était absent ou ne les dominait pas ; la vie journalière, parce qu’elle excluait l’idéal ; l’histoire moderne, parce que Le costume y cachait la beauté et parce que le mouvement y détruisait l’harmonie des lignes ; les passions et le christianisme parce qu’ils empruntaient leur intérêt à des beautés immatérielles, étaient éliminés ou méprisés. La mythologie, l’histoire ancienne et l’allégorie permettaient, au contraire, de représenter l’homme nu sans trop d’invraisemblance ou, du moins, de le draper avec majesté ; elles favorisaient l’entreprise étrange de corriger la nature par l’idéal ; aussi étaient-elles, pour les artistes, des maîtresses favorites d’inspiration.

On voit en quel sens extérieur et restreint l’aride David relevait du paganisme. Ce n’est pas pour avoir saisi le sens intime de la vie païenne qu’il se consacrait à la chanter. Il n’avait pas pénétré, comme le firent les maîtres italiens au seizième siècle, comme devait le faire un jour M. Puvisde Chavannes, dans le bois sacré cher aux Arts et aux Muses. Le grand Pan ne modulait pas pour lui sur sa flûte qui charme les Dieux et les Hommes. Du paganisme, comme de l’antiquité, il n’avait compris que la lettre. Un enchaînement de conséquences logiques avait seul tourné la France vers Athènes et vers l’Olympe ; l’Amour n’avait pas eu de part à ce mouvement et l’Ecole restait archéologique et formelle. Ceux qui peignent l’allégorie, la mythologie ou l’histoire antique se parent, alors, du litre de peintres d’histoire. Ils ont [tris la part la plus noble et dédaignent la peinture de genre dont le pinceau, qu’il représente un intérieur de paysan ou la bataille de Rocroy, ne peut atteindre l’idéal. Le peintre de portraits est à peine un artiste, car ses œuvres n’ont d’autre mérite que la ressemblance. L r, peintre paysagiste , enfin, aura beaucoup de peine à se faire pardonner d’avoir choisi « un genre qui ne devrait pas exister » (2). « Les ouvrages peints par les nations copistes, dit Delécluze, qui désigne ainsi la Hollande, ne. sont que des objets d’études philosophiques ou de pure curiosité (3). » El, selon le bon ’Paillasson, que n’aveugle pourtant point l’amour de l’Ecole, « la postérité, en distribuant ses couronnes, met une grande distance entre les auteurs d’une femme qui lient un pot de bière et ceux du testament d’Eudamidas (4). » (1) Ibid.., III, xvii.

(2| Lettres critiques et philosophiques sur le salon de l’an III, cité par André Michel, L’Art moderne, p. 3. (3) Delécluzc, Traité de la peinture, p. 27.

(i) Taillasson, Observations, 1807. p. 168. — «Si Téniers eût bien compris la définition de la peinture,