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Cette idée dominait qu’un tableau est fait pour l’œil et qu’il doit produire une impression agréable et unique.

Reynolds (1), dans ses portraits, concentrait toute son attention sur les physionomies. Dès lors, il n’était plus besoin d’achever avec minutie toute la toile. Le costume même pouvait être lâché. Une grande draperie rouge servait de repoussoir (2) ; ou bien c’était un paysage peint par larges masses verdâtres ou rousses (3). Le cheval d’un officier n’apparaissait plus que comme une tache sombre sur laquelle son maître se détachait mieux (4). Mais ces accessoires, en apparence abandonnés, respiraient d’une vie intense. Ce paysage était vrai et séduisant. Ces personnages gracieux, comme les filles de sir William Montgomery (3), héroïques comme Lord IlcaUifield (5), avaient une profonde vérité individuelle. Par dessus tout, les Ions de la toile s’harmonisaient dans une impression commune et, depuis les rouges vifs jusqu’aux bitumes se fondaient en un ensemble chatoyant soutenu par des notes dominantes.

On sentait le plaisir (pie le maître éprouvait à peindre et l’on voyait aussi que, souvent il n’avait recherché que cet unique plaisir. Ainsi, lorsqu’il composait ses légères allégories : Vénus et V Amour (6), le Serpent dans l’herbe (7) ; aimable, surtout, dans les scènes enfantines qu’il esquissait d’une tonalité légère et dorée, avec une hardiesse et une justesse d’indications admirables : l ’Age de l innocence (8), Samuel (8), Puck (6), Master John Creioe en Henry VIII (6), délicieuse fantaisie et, avant tout, Robinetta (8), petit chef-d’œuvre de couleur et de finesse. Près de lui, Gainsborough (9), avec des qualités différentes, poursuivait une œuvre analogue. Lui aussi, portraitiste incomparable, il avait une grâce aristocratique, une sorte de dignité aisée qui donnaient à ses figures de femme une subtile distinction.

Peu de portraits laissent un souvenir plus exquis et plus intense que celui de Mrs Siddons (10). Coloriste plus froid que Reynolds, mais d’une habileté dont YEnfant bleu fut la plus éclatante preuve, il avait, pour le paysage, une prédilection marquée. Même en ses portraits, il lui accordait une large (1) 4723-1792.

(2) Lady Cockburn et ses enfants, n° 1303 de la National Gallery. (3) Les Grâces décorent ta statue de l’Hymen, n* 79 de la National Gallery ; Portrait de miss Carnac, à la collection Wallace.

j i) Portrait du Capitaine Orne, n° 681 de la National Gallery. (3) L’Homme à la clé, no 111 de la National Gallery. (6) Exposé en 1893 aux Grafton Galleries.

(7) N° 883 de la National Gallery.

(8) A la National Gallery, sous les nos 307-102-892. (9) 1727-1783.

(10) N» (583 de la .ational Gallery ; rapprocher le portrait de Miss Linley (collection de Lord Sackville), exposé, en 1893, aux Grafton Galleries.