Page:Rosny - La Guerre du feu.djvu/106

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fallait défendre la flamme contre la pluie et les vents ; prendre garde qu’elle ne décrût ni n’augmentât au-delà de certaines limites fixées par une expérience millénaire, et renouveler souvent l’écorce.

Naoh n’ignorait aucun des rites transmis par les ancêtres : il ranima légèrement le Feu, il imbiba la surface extérieure d’un peu d’eau puisée dans une flaque, il vérifia la fente et l’état du schiste. Avant de fuir, il s’empara des haches et des sagaies éparses, puis il jeta un dernier regard sur le camp et sur la plaine.

Deux des adversaires tournaient leurs faces roides vers les étoiles ; les deux autres, malgré leurs souffrances, se tenaient immobiles, pour faire croire qu’ils étaient morts. La prudence et la loi des hommes voulaient qu’ils fussent achevés.

Naoh s’approcha de celui qui était blessé à la cuisse, et déjà il dardait sa sagaie : un étrange dégoût lui pénétra le cœur, toute haine se perdait dans la joie, et il ne put se résigner à éteindre de nouveaux souffles.

D’ailleurs, il était plus urgent d’écraser le foyer : il en éparpilla les tisons, à l’aide d’une des massues laissées par les vaincus, il les réduisit en fragments trop menus pour durer jusqu’au retour des guerriers, puis, entravant les blessés dans des roseaux et des branches, il cria :

— Les Kzamms n’ont pas voulu donner un tison au fils du Léopard et les Kzamms n’ont plus de Feu. Ils rôderont dans la nuit et dans le froid, jusqu’à ce qu’ils aient rejoint leur horde !… Ainsi, les Oulhamr sont devenus plus forts que les Kzamms !

Naoh se retrouva seul au pied du tertre où Nam et Gaw devaient le rejoindre. Il ne s’en étonna point : les jeunes guerriers avaient dû faire de vastes détours devant leurs poursuivants…

Après avoir couvert sa plaie de feuilles de saule, il