Page:Rosny - La Guerre du feu.djvu/147

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Oulhamr, qui sont forts comme l’ours et agiles comme le saïga. Si les Nains Rouges les attaquent, ils mourront en grand nombre ! Naoh seul en abattra dix… Nam et Gaw en tueront aussi. Les Nains Rouges veulent-ils faire mourir quinze de leurs guerriers pour détruire trois Oulhamr ?

De toutes parts, des voix s’élevèrent dans les buissons et parmi les hautes herbes. Le Fils du Léopard comprit que les Nains Rouges voulaient la guerre et la mort. Il ne s’en étonnait pas : de tout temps, les Oulhamr n’avaient-ils pas tué les hommes étrangers qu’ils surprenaient près de la horde ? Le vieux Goûn disait : « Il vaut mieux laisser la vie au loup et au léopard qu’à l’homme ; car l’homme que tu n’as pas tué aujourd’hui, il viendra plus tard avec d’autres hommes pour te mettre à mort. » Naoh ne reviendrait pas mettre à mort les Nains Rouges, s’ils lui laissaient la route libre, mais il comprenait bien qu’ils devaient le craindre.

D’ailleurs, il savait aussi que les hommes de deux hordes se haïssent naturellement plus que le rhinocéros ne hait le mammouth. Sa grande poitrine s’emplissait de colère ; il provoqua les ennemis, il s’avança vers les buissons en grondant. De minces sagaies sifflèrent, dont aucune ne vint jusqu’à lui. Et il poussa un rire farouche :

— Les bras des Nains Rouges sont faibles !… Ce sont des bras d’enfants !… À chaque coup, Naoh en abattra un de sa massue ou de sa hache…

Une tête s’aperçut parmi des vignes sauvages. Elle se confondait avec la teinte des feuilles rougies par l’automne. Mais Naoh avait vu briller les yeux. Une fois encore, il voulut montrer sa force sans employer la sagaie : la pierre qu’il lança fit frémir le feuillage, un cri aigu s’éleva.