Page:Rosny - La Guerre du feu.djvu/84

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décelait une force immense, mais moins d’aptitude à la course que le corps des Oulhamr.

Le veilleur avait interrompu sa marche. Il avançait sa tête vers la colline. Sans doute, quelque vague émanation l’inquiétait, où il ne reconnaissait ni l’odeur des bêtes ni celle des gens de sa horde, tandis que l’autre veilleur, doué d’une narine moins subtile, somnolait.

— Nous sommes trop près des Dévoreurs d’Hommes ! remarqua doucement Gaw. Le vent leur porte notre trace.

Naoh secoua la tête, car il craignait bien plus l’odorat de l’ennemi que sa vue ou que son ouïe.

— Il faut tourner le vent ! ajouta Nam.

— Le vent suit la route des Dévoreurs d’Hommes, répondit Naoh. Si nous le tournons, c’est eux qui marcheront derrière nous.

Il n’avait pas besoin d’expliquer sa pensée : Nam et Gaw connaissaient, aussi bien que les fauves, la nécessité de suivre et non de précéder la proie, à moins de dresser une embuscade.

Cependant, le veilleur adressa la parole à son compagnon, qui fit un signe négatif. Il parut qu’il allait s’asseoir à son tour, mais il se ravisa, il marcha dans la direction de la colline.

— Il faut reculer, dit Naoh.

Il chercha du regard un abri qui pût atténuer les émanations. Un épais buisson croissait près de la cime : les Oulhamr s’y tapirent et, comme la brise était légère, elle s’y rompait, elle emportait un effluve trop faible pour frapper l’odorat humain. Bientôt le veilleur s’arrêta dans sa marche ; après quelques aspirations vigoureuses, il retourna au campement.

Les Oulhamr demeurèrent longtemps immobiles. Le fils du Léopard songeait à des stratagèmes, les yeux tournés vers la lueur assombrie du brasier. Mais il ne