Page:Rosny - La force mystérieuse, 1914.djvu/137

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— Je suis seul !… Tout seul !

L’horreur l’emplissait. Puis il eut une sorte de délire. Aucune idée, aucune impression n’étaient saisissables : elles viraient comme des brins d’herbe dans la rivière. Ce vertige lui donna une manière de force ; il parvint à se dresser, et il n’y eut plus qu’une seule sensation, ardente, intolérable : la faim… Elle le mena hors du laboratoire, le conduisit dans la cuisine, où il mangea goulûment et pêle-mêle, quelques biscuits, du sucre, un peu de chocolat. Ce repas fut efficace, la pensée redevint lucide et un vague optimisme gonfla la poitrine du jeune homme :

— Jusqu’au bout !… Il faut vouloir jusqu’au bout !

Mais la douleur revint dès qu’il se retrouva dans le laboratoire. Il n’osait pas se pencher sur ses compagnons ; il voulait garder une ombre d’espérance – et, pour se donner un délai, il se dirigea vers une des grandes tables.