Page:Rosny - La force mystérieuse, 1914.djvu/168

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corbeaux, nourris par le désastre, passaient avec des clameurs de guerre.

Alors, Meyral cessa de lutter contre sa tendresse. Il la laissait croître, remplir ses jours comme un fleuve inépuisable et former la substance de ses rêves. Qu’importait l’avenir ! S’il le fallait, Georges acquitterait en peines les jours de son enchantement ! Du moins aurait-il passé par la porte d’ivoire et rôdé au jardin féerique. Pendant longtemps, la claire Sabine, à l’abri du peuple ennemi des mâles, n’écouterait aucune voix.

Elle était à l’heure de son plus grand charme. La soie brillante de sa chevelure semblait s’être accrue encore ; son cou, naguère frêle, avait l’éclat, la rondeur et le rythme. La forme de ses joues était parfaite ; il s’échappait de ses yeux frais une lueur de renouveau qui faisait s’élever devant Meyral toutes les créatures passionnantes de la fable.

Quand la famille débarquait sur la rive, tandis que la servante tragique disposait le goûter, il semblait à Georges qu’ils formaient