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Page:Rosny aîné - Au château des loups rouges, 1929.djvu/14

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fond régna dans le domaine. Jaguar ne bougeait plus ; étendu devant sa niche, il semblait rêver dans les cendres du crépuscule.

— Une fausse alerte ? se demandait Denise.

À travers les phrases de Georges Elliot, elle en lisait d’autres aussi précises, sur la bande qui dévastait le département voisin. En un an, elle avait dévalisé vingt maisons, assassiné dix personnes. Toutes les poursuites demeuraient vaines.

Elle pratiquait une violence d’une férocité hideuse. Des vieillards étaient tués à coups de talon : on violentait toutes les femmes, même les vieilles ; ceux qu’on soupçonnait de cacher leur fortune avaient les pieds rôtis, les ongles arrachés, le visage arrosé de vitriol.

Dans la solitude, l’ombre tassée sur le château et sur les collines, les images devenaient plus précises. Avec ses nerfs affinés, son âme aux nuances délicates, Denise tremblait devant tout ce que la vie même quotidienne