Page:Rosny aîné - La Mort de la Terre - Contes, Plon, 1912.djvu/104

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Pendant quelques minutes, les planeurs voguèrent par-dessus l’oasis. Elle semblait déserte. Aucun homme, aucune femme, aucun enfant ne se montrait au seuil des demeures, sur les chemins ni sur les champs incultes. Et cette solitude glaçait l’âme des serviteurs.

— Seraient-ils morts enfin ? murmura Arva.

— Peut-être ! répondit Targ.

Les planeurs descendirent, jusqu’à frôler le haut des maisons et les plates-formes des planétaires. C’était le silence et l’immobilité d’une nécropole. L’air, assoupi, ne mouvait pas même la poussière ; seules des bandes de ferromagnétaux s’agitaient avec lenteur.

Targ se décida à descendre sur une plate-forme et fit vibrer le transmetteur d’un ondifère ; un appel puissant se répéta de conque en conque.

— Des hommes ! s’écria soudain Arva.

Targ reprit son vol. Il vit deux personnages au seuil d’une demeure et, pendant quelques minutes, hésita à les interpeller. Quoique les habitants de l’oasis ne formassent plus qu’un groupe pitoyable, Targ vénérait en eux son Espèce et respectait la loi. Celle-ci était gravée dans chacune de ses fibres ; elle lui apparaissait profonde comme la vie même, redoutable et tutélaire, infiniment sage, inviolable. Et, puisqu’elle l’exilait à jamais des Terres-Rouges, il s’inclinait devant elle.

Aussi sa voix trembla-t-elle, lorsqu’il s’adressa à ceux qui venaient d’apparaître.