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XVI

Dans la nuit éternelle

Le planeur n’était plus qu’à vingt mètres du sol. En pleine vitesse, il allait tomber à pic et se briser, lorsque Targ, d’instinct, le redressa. Alors, légèrement, et traçant une parabole élégante, il reprit son vol jusqu’aux abords de l’enclave. Et ayant atterri, le veilleur demeura immobile, paralysé de douleur, devant une fosse énorme et chaotique : là gisaient, sous les ténèbres de la terre, les êtres qu’il aimait plus que lui-même.

Pendant longtemps, les pensées rampèrent en désordre dans le cerveau du pauvre homme. Il ne songeait pas aux causes du cataclysme, il n’en discernait que la férocité obscure, il le rattachait confusément à tous les malheurs de ce morne septénaire. Les images défilaient au hasard. Constamment, il apercevait les siens, tels qu’il les avait quittés l’avant-veille. Puis, les silhouettes tranquilles étaient emportées dans une horreur innommable… Le sol s’ouvrait. Il les voyait disparaître. L’épouvante était sur leurs faces. Ils appelaient celui en qui ils avaient mis leur confiance et qui, peut-être à l’heure même de leur mort, croyait vaincre la fatalité…

Lorsqu’il put enfin réfléchir, le Dernier Homme