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Page:Rosny aîné - La Mort de la Terre - Contes, Plon, 1912.djvu/149

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LA PETITE AVENTURE

me lira un hurlement d’horreur… Je criai avec rage :

— Mais elle n’avait rien !

— Rien, fit lentement la gouvernante. Rien ! Elle pouvé vivre cent ans… Elle descendait l’escalier, elle a fait un faux pas et elle est tombée… Le médecin ne sait pas encore ce qui est cassé dans son corps…

L’Anglaise demeura longtemps en silence, puis elle dit, tout bas, comme si elle avait peur d’être entendue :

— Voulez-vous la voir ?

Et je la vis. Elle était comme étendue dans la broussaille magnifique de sa chevelure. La fatalité l’avait frappée si vite que tout l’aspect de la vie était demeuré : le rythme heureux du visage, les jolis bras bien jointés, ce beau corps où la jeunesse jouait à miracle…

Je vécus là ma première agonie, la plus dure, la plus hideuse, et quand je rentrai chez moi, ah ! j’eus bien de la peine à ne pas saisir le revolver qui étincelait sur la table et à fuir ce monde où « tout est vanité et rongement d’esprit ».

Comme je rêvais sinistrement, je saisis le livre que je lisais naguère. Tandis que je l’ouvrais machinalement, je vis tout à coup le petit coléoptère