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Page:Rosny aîné - La Mort de la Terre - Contes, Plon, 1912.djvu/196

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CONTES. — PREMIÈRE SÉRIE

évidemment d’une manœuvre tactique. Elle parut plutôt bizarre au généralissime. Les deux corps signalés semblaient jetés à l’aventure. Sans doute, ils gardaient quelque contact avec le reste de l’armée, mais un contact précaire, périlleux.

Laufs-Pacha combina immédiatement les mesures utiles pour les isoler pendant la bataille. Des artilleurs nombreux furent détachés aux points les plus vulnérables ; des batteries nouvelles dirigées vers les ailes. Ces manœuvres étant en voie d’exécution, le généralissime devint songeur. Il lui semblait avoir tout prévu pour transformer une action défensive en action offensive enveloppante, mais l’immobilité de l’armée austro-hongroise l’étonnait. Il savait par ses espions qu’Eberhardt était résolu à une vigoureuse offensive, et d’ailleurs ce plan se déduisait de tout le début de la campagne. C’était à cette éventualité que Laufs-Pacha avait préparé l’armée turque, et quoiqu’il se crût en mesure de prendre l’offensive, il eût préféré combattre selon des prévisions qu’il avait mûrement envisagées. Aussi sa satisfaction fut-elle réelle, quand il apprit que le centre ennemi se décidait à l’action.

Pour mieux se rendre compte de l’événement, Laufs monta lui-même dans un petit dirigeable et braqua sa longue-vue sur le site. Effectivement l’armée austro-hongroise était en marche. Une nuée de tirailleurs s’avançait en ligne droite vers l’ennemi, d’autres suivaient une ligne oblique ou