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Page:Rosny aîné - La Mort de la Terre - Contes, Plon, 1912.djvu/210

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CONTES. — PREMIÈRE SÉRIE

— Sûr que vous viendriez me voir au dernier moment.

Je le lui promettais, résolu à tenir parole.

Malgré mes efforts, sa grâce fut refusée. Et vers la fin d’une brumeuse nuit de novembre, je me trouvai près de la cellule du condamné avec la magistrature, l’aumônier, les gardiens et Deibler. Nous étions tous fort émus, même les gardiens. Le prisonnier dormait paisiblement : ses nuits, du reste, étaient bonnes. L’idée de son réveil nous faisait froid au cœur.

La porte s’ouvrit. Le sommeil du misérable était si profond qu’il ne s’en aperçut même pas. On pouvait voir son crâne sombre, sa face grise et la forme renflée de son corps sous les couvertures.

Un gardien le toucha doucement.

Il fit un geste vague, se tourna à demi et se frotta les yeux, en poussant un grognement. Puis, il se dressa sur son séant et nous regarda avec une évidente surprise, mais sans crainte :

— Quoi qu’y gna ? grommela-t-il. C’est pas une heure pour déranger le monde.

Alors le procureur, tout pâle, murmura d’une voix tremblante :

— Pierre Fourgues, j’espère que vous aurez du courage… Votre recours en grâce est rejeté.