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L’ONCLE ANTOINE


Lorsque Antoine Malavaine atteignit sa cinquantième année, l’existence ne lui était point défavorable. Il avait conquis soixante mille livres de rente dans la République Argentine, et il prenait sa retraite. C’était un homme qui ne s’ennuyait pas avec lui-même, condition expresse pour goûter le repos. Le domaine qu’il s’offrit en Seine-et-Oise comportait les herbes, les eaux, les grands arbres et les fleurs, qui sont l’ambiance naturelle du bonheur. Antoine Malavaine fit connaissance avec les mésanges, les fauvettes, les geais, les rouges-gorges, les piverts et même ces vieux rossignols dont les hyperboles des poètes n’ont pu détruire le charme. Il connut aussi les lapins au clair de lune, les lièvres épouvantés, quelques biches menées par un cerf au front duquel poussait un petit arbre. Et rien que d’entendre chuchoter les peupliers, murmurer les hêtres et gémir les chênes, il retrouvait la fraîcheur de son enfance. Comme il appréciait par ailleurs le charme d’une cuisine