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CONTES. — PREMIÈRE SÉRIE

Donc, en avril, nous étions aux prises avec une force sudiste, dans le Tennessee. Une rivière et des terres inondées nous séparaient : nos combats n’étaient guère que des escarmouches. Cependant, peu à peu, les mouvements prenaient quelque consistance, en même temps que le nombre des combattants augmentait de part et d’autre. Vers la fin d’avril, mon régiment se montait à quinze cents hommes, et tout le corps d’armée — si cet amas d’aventuriers peut porter un nom aussi pompeux — s’élevait à près de dix mille unités. L’ennemi devait être moins nombreux, mais il avait plus de cohésion et des pièces d’artillerie de plus longue portée. Nous attendions quelques canons promis depuis longtemps pour engager une action décisive. Les canons n’arrivaient point.

Nous eussions été en quelque sorte assiégés, sans l’excellence et l’étendue de nos positions, jointes à de bonnes lignes de retraite, bien gardées. Notre action s’étendait sur sept ou huit villages qui se décoraient glorieusement du nom de villes. Les vivres étaient simples, mais abondants — surtout la viande : quelques sources nous donnaient une eau excellente. Grossiers et goulus, nos hommes prisaient plus la quantité que la qualité : aussi l’endroit leur convenait-il parfaitement et ils attendaient sans impatience les renforts d’artillerie.