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CONTES. — PREMIÈRE SÉRIE

épouser une autre femme. Mais quoique le jeune homme lui fût sympathique, elle voulut prendre son temps pour décider si elle pourrait être heureuse avec lui. Dans les intervalles du service, Herbert promenait sa « sweetheart » aux alentours du village où elle habitait. Plus d’un de nos hommes dut souhaiter des malheurs au jeune capitaine, mais il faut dire à l’honneur de l’humanité que personne ne lui envoya une balle dans les reins ou ne lui chercha querelle.

J’approuvais cette idylle, sachant fort bien qu’elle n’empêcherait pas le camarade de faire tout son devoir — et même je m’y intéressais. Je trouvais seulement que Mary Hanthorn était un peu lente à rendre l’amour qu’on lui avait voué. Les choses en étaient là, lorsque nous eûmes trois jours de bonnes escarmouches le long de la rivière. Nos hommes se comportèrent bravement, et les officiers ne furent pas trop malhabiles. Néanmoins, nous n’eûmes pas l’avantage. À plusieurs reprises, des volées de la grosse artillerie ennemie brisèrent notre élan : c’est tout juste si nous pûmes ramener nos troupes en bon ordre. Le quatrième jour, on se reposa de part et d’autre. Les Confédérés ne s’étaient pas crus assez forts pour nous donner l’assaut ; de notre côté, nous nous sentions incapables de franchir la rivière sans l’appui d’une canonnade efficace. Donc, le quatrième jour, tout le monde se tint coi. De-ci, de-là, quelque boulet nous venait rappeler que le pays n’était pas